Dans son travail, Minia Biabiany s’intéresse aux questions de territoires et aux contextes caribéens et guadeloupéens. Leurs histoires coloniales et la pression d’assimilation sont au cœur de sa pratique artistique dans laquelle elle propose des outils pédagogiques. Dans Difé, le tissage lui permet de réfléchir aux structures de notre langage, le dessin dans l’espace pose des questions de perceptions. Shéhérazade la nuit est une exposition collective de monographies qui se répondent les unes aux autres. Elle réunit les œuvres de six artistes aux origines différentes : Minia Biabiany, Miguel Gomes, Ho Tzu Nyen, Pedro Neves Marques, Lieko Shiga et Ana Vaz.
Ecouter la matière
« J’ai une grande confiance en la matière, il s’agit d’un dialogue. Je ne me considère pas maîtresse d’elle, je ne la domine absolument pas, au contraire. Ce qui m’intéresse, c’est comment l’écouter. » Minia Biabiany
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Tresser des histoires
« Le fil est un matériau que j’ai utilisé déjà beaucoup dans mon travail, qui est lié au tissage et aussi à la question du récit. Il est toujours présent, il me permet de dessiner dans l’espace avec beaucoup de force tout en restant dans quelque chose de fragile, et cette fragilité-là pour moi est importante. Dans toutes les installations, j’amène cette fragilité de différentes manières. Je pense qu’il est très important d’amener, pour celle ou celui qui regarde, la question d’où se placer. Là, ces fils ont déjà pris plusieurs formes : les nasses qui étaient à la base un tressage en bambou […] Ces nasses me permettaient de trouver une écriture qui soit encore artisanale, complètement manuelle et qui produise surface. Qui fasse transformation de la matière en texte. » Minia Biabiany
Soigner la terre
« Il était impossible de taire certaines histoires, comme celles du chlordécone, plus longtemps. Beaucoup de ces récits sont venus au grand jour d’une façon beaucoup trop douce. C’est scandaleux d’être empoisonné et de savoir que celui qui nous empoisonnait savait qu’il nous empoisonnait. Quand on réfléchit à la réaction de la population, il y a beaucoup trop de tolérance. Ce sont des histoires qui arrivent trop tard, par rapport à la situation actuelle, il y a des possibilités de soigner cette terre qui ne sont pas soutenues par l’Etat français dans les financements, sur des opérations peu onéreuses. Il y a une domination sur ces décisions-là qui nous tuent. » Minia Biabiany
Émission réalisée dans le cadre du festival Et maintenant ? ; quelles histoires nous racontons nous ?
Les expositions Difé et Shéhérazade la nuit seront visibles au Palais de Tokyo du 19 octobre 2022 au 08 janvier 2023.
Archives
Haroun Tazieff, émission « Inter Actualités », France Inter, 09/07/1976
Daniel Maximin, émission « Un jour au singulier », France Culture, 15/10/1995
Denetem Touam Bona, émission « Par les temps qui courent », France Culture, 02/05/2022
Stéphane Thidet, émission « Par les temps qui courent », France Culture, 18/04/2018
Références musicales
Arnaud Dolmen, SQN (feat. Vincent Peirani)
Eugène Delouche et l’Orchestre Typique Martiniquais, Du feu pris
Chassol, Bwa Brilé (Alix & Lisa)
Paru en premier sur Radio France