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Hélène Cixous : « Mon livre est extrêmement peuplé, les vivants et les morts ne s’y distinguent pas »

categorie litterature Hélène Cixous : "Mon livre est extrêmement peuplé, les vivants et les morts ne s’y distinguent pas"

A partir d’une liasse de lettres dictées par les défunts à la femme qui vivait au-dessus de sa famille à Oran quand elle avait 5 ans, Hélène Cixous évoque les siens disparus, Eve, sa mère, omniprésente dans son oeuvre, son père Georges et son enfance algérienne.

Un mot pour susciter une interrogation infinie

« Mdleilmm, ce mot est une apparition. Il existe, car il a été incarné, on l’a entendu au moins une fois. D’ailleurs, ça m’est arrivé, je ne l’ai pas inventé. Par la suite, il est devenu un livre, un chœur, parce qu’il a une fortune dans le monde dans lequel il a fait irruption. Ainsi, chaque lecteur et lectrice s’essaient à ce mot. Ce qui m’intéresse le plus, c’est qu’il suscite l’interrogation à l’infini. Cela m’a amenée à réfléchir interminablement, et me demander ce qui faisait que les êtres humains, comme les chats, devant un mot inattendu, inédit, étaient saisis par le besoin et la pulsion de le comprendre. De même, si on s’attache tellement à l’interrogation, c’est aussi parce que c’est l’émanation de notre rapport à la poésie, à la science, à l’amour, aux noms et à tout ce qui s’y attache. »

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Des morts et des mots qui accompagnent

« Mon livre est extrêmement peuplé, il est illimité dans le peuplement car les vivants et les morts ne s’y distinguent pas. Pour moi, dès qu’on interpelle une personne absente avec laquelle on a des liens profonds, elle est automatiquement là. Les morts m’accompagnent depuis que, d’une certaine manière, je suis née de la mort de mon père. Mais dès que j’écris que les morts m’accompagnent, ce qui se pose à côté de moi c’est : les mots m’accompagnent. Pour moi c’est indissociable, les mots sont des âmes, des génies et des voix. Ensuite, il y a les mystères des mots. Quand je dis un mot, ce mot parle, il est plein d’autres mots et de voix, et il m’indique des routes. Finalement, dans l’écriture, ce qu’on est en train d’écrire se multiplie à l’infini. »

Grâce à l’écriture, ce qui est parti revient

« Ce que nous vivons comme perdu ne l’est pas, et il tient à nous que cela se passe ainsi, avec l’aide de ce formidable secours, cette grâce qu’est l’art, et plus particulièrement l’écriture, car elle va beaucoup plus loin que nous. Grâce à elle, ce qui est parti revient. De plus, l’écriture est un art modeste, tout le monde dispose de la langue, et si on n’en a pas peur, elle donne tout. Dans notre vie orale, dans notre quotidien, nous suivons un seul sentier. Mais dans notre vie intérieure, on peut être sur plusieurs chemins à la fois. »

Archives

Dominique Fourcade, émission Par les temps qui courent, Marie Richeux, France Culture, 14/05/2018

Delphine Horvilleur, émission La grande table, Olivia Gesbert, France Culture, 03/03/2021

Charles Maillant, émission Le monde insolite, Jacques Borel, France Culture, 30/06/1972

Références musicales

Odezenne, Des chapeaux dans des lapins

KMRU, Jinja Encounteurs

Dom La Nena, Valsa

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