L’isolement, la solitude, le corps en rapport avec le monde et la condition d’être social, sont les sujets centraux des peintures d’Ymane Chabi-Gara. Le corps des autres mais aussi son propre corps, lui servent de point de convergence pour représenter des individus, seuls ou en groupes restreints, dans des univers et des situations reflétant leur intériorité.

Une peinture construite autour du détail
« J’ai remarqué qu’avec la mémoire, on se souvient de choses qui ne sont pas importantes. Moi, j’ai beaucoup de souvenirs qui sont des impressions, ses sensations, des émotions, et c’est justement ce que je recherche en peinture. Je veux représenter des moments qui ne sont pas importants, ou qui sont très personnels et pourtant qui touchent à quelque chose d’universel. Toute ma peinture est construite autour de l’idée de détail, même si je fais de très grands formats. Je pars toujours d’une image pour peindre, et en général, c’est un petit détail qui va me donner l’idée de du tableau. Je pense que le détail est vraiment le moteur de ma peinture, c’est une façon de remettre de l’ordre dans le désordre et le hasard de la vie. »
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Une peinture comme un palimpseste
« Je peux passer des semaines sur des parties de peintures, qui vont être très détaillées, en accord avec l’image de départ, et au bout d’un moment, je trouve que cela ne sert à rien, que c’est du fignolage, et cela n’apporte pas grand-chose. Alors, je vais recouvrir la surface et utiliser ce que j’ai dessiné. Je sais que, par le recouvrement, il restera toujours une trace de ce que j’ai fait, et que je pourrai partir de ça pour aller vers autre chose. En fait, j’ai toujours peur que les choses deviennent trop confortables, et donc j’ai tendance à tout remettre en jeu. Parfois, ce n’est pas réussi, mais ce qui m’intéresse avant tout c’est la recherche, plus que le résultat final. »
Une peinture impensée
« Je trouve que c’est une très bonne époque pour peindre, parce qu’il n’y a plus d’enjeux. On est complètement libre au niveau des règles et des carcans. Chaque artiste a une façon de peindre particulière, et j’ai toujours l’impression que les gens croient que c’est quelque chose de complètement pensé, mais pour moi, ce n’est pas le cas : les choses se font, comme elles se font, et si j’ai le contrôle des techniques que j’utilise, je ne l’ai pas sur ce que je peins. »

Archives
Pierre Alechinsky, émission A voie nue, Jean Daive, France Culture, 16/09/1998
Hirano Keiichiro, émission Hors champs, Laure Adler, France Culture, 21/01/2016
Thomas Lévy-Lasne, émission L’atelier A, Arte, 17/03/2017
Jean-Charles Blais, émission Nuits magnétiques, Jean Daive, France Culture, 26/03/1993
Lecture
Sei Shonagon, Notes de chevet
Références musicales
Dirty three, Rain song
Holly Herndon, Fear Uncertainly, Doubt
Otoboke Beaver, Yakitori
Paru en premier sur Radio France